Il y a des mots qui – à force d’être utilisés à tort et à travers – peuvent finir par être dépouillés de leur sens.

Le mot « bienveillance » est de ceux-là.

Dans le petit monde du développement personnel – comme trop souvent dans celui de la mindfulness - la bienveillance finit ainsi par (trop) souvent juste consister en une attitude doucereuse et un ton, une manière de parler.

Notre culture « politiquement correcte » peut ainsi nous amener à confondre la bienveillance avec le mensonge pieux et l’attitude consistant à tenir des propos non bienveillants sous une forme mielleuse, la violence ressentie n'en étant que plus forte.

Nous en arrivons même souvent - notamment sur le net - à nous abreuver de formules lénifiantes, largement déconnectées de notre réalité.

La chose n’est pas grave en soi, dans la mesure où elle est profondément humaine, mais devient problématique dès lors qu’elle est pratiquée dans un cadre où c’est précisément l’authenticité de la bienveillance qui est prônée.

Or, la bienveillance est bien moins une question d’attitude que de sentiment.

Si tous les gens qui font du mal en disant gentiment « c’est pour une bonne cause » osaient  dire "c'est mon intérêt",  le monde serait un havre de compréhension ... 

La bienveillance consiste ainsi bien davantage en une intention honnête qu’en une posture.  Sous cet angle de vue, il est infiniment plus sain d’exprimer clairement son désaccord et sa colère, que de faire semblant de ne pas être en colère, en facturant chèrement son désaccord sur un ton de militant pacifiste.

Faute de quoi, il s’agit tout simplement d’hypocrisie, le pire étant de ne même pas en avoir conscience.

La bonne foi étant une raison mais pas une excuse.

La pleine conscience nous invite à la bienveillance, mais PAS à la comédie consistant à faire semblant de l'être.

L'honnêteté du sentiment est le fondement de l'expression de celui-ci; et non l'inverse.